Illustrer la
Démarche mathématique
Donner du sens à la résolution de problèmes avec les contes
Résoudre un problème, ce n’est pas aller directement au résultat. Avant d’arriver à destination, il faut faire du chemin ! On le néglige souvent car c’est un cheminement personnel, intérieur, invisible : chercher, formuler des hypothèses, essayer, se tromper, ajuster… puis expliquer. Une véritable quête, avec ses péripéties !
Les contes proposés ici donnent du sens à ce parcours. Comme le Petit Poucet, on avance pas à pas en gardant la trace de ce que l’on a fait. Comme les Trois Petits Cochons, on teste plusieurs méthodes avant de crier eurêka. (D’autres exemples viendront.)
Ces contes servent d’appui pour mettre des images et des mots sur ce que vivent les élèves en situation de recherche. Ils dédramatisent l’expérience (hésiter et recommencer font partie du processus) et humanisent les mathématiques en les reliant à des émotions exprimables et à des récits partagés.
Comme dans un conte, on progresse pas à pas, on explore, on s’égare, on recommence ; peu à peu, à force d’obstination, on trouve son chemin, on accède à une nouvelle compréhension — et le plaisir de trouver est là.
Pourquoi raconter une histoire et dérouler une preuve sont similaires ?
Le héros vit sa vie, mais des intrigues et des rebondissements surviennent. Il rencontre des personnages positifs ou négatifs, dans un monde régi par ses propres règles, sa propre logique interne. Finalement, des événements inattendus surviennent et la quête avance. Enfin nous comprenons quelque chose que nous ignorions.
Il en va de même pour une preuve. Face à une situation familière, nous pouvons élaborer quelques petits exemples concrets, mais il faut ensuite généraliser et résoudre un problème bien plus vaste, au départ aussi vaste qu'une montagne. Mais grâce à des parchemins d'Anciens contenant des formules magiques efficaces dans certaines conditions, après un peu de travail, la solution tombe et nous comprenons enfin.
Se souvenir d'une preuve est très similaire à raconter une histoire. Il faut identifier les points clés, l'intervention opportune de tel ou tel personnage, un vieux grec barbu et son théorème, s’appliquant sous telles ou telles conditions, pour que les règles internes modifient le contexte jusqu'à la conclusion heureuse. Mais si l'on oublie un détail, toute l'histoire risque de s'écrouler.
Pourquoi faut-il semer des petits cailloux ?
Marquer son chemin, semer des traces – miettes de pain ou petits cailloux – qu'elles soient fragiles ou persistantes, est une caractéristique commune à de nombreux contes et aux mathématiques. Cela permet de retrouver sa route, si l'on peut s'y fier. Sinon, on risque de se perdre.
Prendre des notes est crucial en mathématiques. On détaille les calculs. Cela permet de soulager la mémoire de travail, libérant ainsi de l'espace pour traiter d'autres informations. En cas d'erreur, on peut revenir en arrière et vérifier où l'on a manqué quelque chose. En cas de succès, suivre le même cheminement mènera à un autre succès, plus rapide la deuxième fois.
Pourquoi l’échec est-il formateur ?
Les stratégies adoptées par le héros sont variées. Sa tâche est rarement accomplie du premier coup. Il réessaye encore et encore, avec un angle d'attaque différent, de la flexibilité dans les approches. Cela transforme le héros : il gagne en expérience, comme les trois petits cochons que l’on peut voir comme trois versions d’un même personnage qui mûrit à chaque tentative. L'échec vous transforme et peut vous améliorer. Résoudre un problème conséquent exige persévérance, originalité, flexibilité et efforts.
C'est le cas dans les contes et les mathématiques. Une bonne histoire vaut son pesant de sueur. Et comme le dit Corneille : « À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire ».
Pourquoi faut-il se méfier des apparences ?
Être rapide ou lent, grand ou petit, n'est ni bon ni mauvais face à un problème. Ce qui compte, c’est de prendre le temps de réfléchir, reporter une décision évidente, faire preuve d'esprit critique. Car ce qui paraît simple est souvent plus tortueux, dans les contes. Il faut prouver sa valeur, tout comme un énoncé mathématique nécessite une preuve rigoureuse, formelle. Une simple accumulation de preuves ne suffit pas. Des mensonges peuvent se cacher derrière l'évidence, un petit problème peut s'avérer difficile à résoudre, un problème majeur peut être résolu par une astuce, simple mais puissante.
Pourquoi “ne pas comprendre” signifie parfois ne pas avoir accepté le cadre ?
Le monde d'un conte peut ne pas être évident au premier abord. Il faut supposer des choses, accepter certains axiomes, les animaux peuvent parler, les personnages peuvent être minuscules comme un pouce, et cela crée un contexte dans lequel certaines astuces seront cohérentes avec la logique interne de l’histoire.
Il en va de même pour la plupart des notions mathématiques : il faut accepter que cela fonctionne comme ceci ou comme cela. Parfois, « Je ne comprends pas » signifie simplement « Je n'accepte pas vos axiomes ». Il faut se rendre compte que, parfois, il n'y a rien à comprendre, juste quelques axiomes à accepter tels qu'ils sont, sinon l'histoire ne peut pas se dérouler.